Jean-Claude Gerbedoen,
le parcours riche et diversifié d’un ingénieur maturation à l’IEMN
C’est pendant son année de DESS (Master pro) en MRH (Micro-ondes, Radio- et Hyperfréquence) au cours d’un stage de 4 mois chez OMMIC en région parisienne que Jean-Claude découvre l’univers de la salle blanche et y prend goût en mettant en place un banc de caractérisation des transistors HBT (Heterojunction Bipolar Transistor). Fasciné par la recherche et la possibilité de créer ses propres composants, il valide une année de DEA (Master Recherche) et enchaîne sur un doctorat.
Tout au long de sa thèse, qu’il effectue dans l’équipe PUISSANCE de l’IEMN de 2005 à 2009 sous la direction de Jean-Claude De Jaeger et encadré par Ali Soltani, il étend ses connaissances et sa maîtrise des transistors (Fig.1).
Pour son sujet financé par une bourse DGA (Délégation générale de l’Armement), il conçoit, réalise et caractérise des transistors HEMT (High Electron Mobility Transistor) sur substrats silicium bas coût, pour des applications de téléphonie mobile et de communications satellite afin d’en sortir les meilleures performances possibles. En parallèle, il élargit ses compétences en se formant à de nouveaux équipements par le biais de projets annexes :
– fabrication de photodétecteurs MSM (jonction métal/semi-conducteur/métal) sur des matériaux grand Gap pour des applications spatiales dans le cadre du projet K-star en collaboration avec le ROB (Fig. 2).
– développement d’un procédé pour améliorer l’étalement des résines pour les étapes de lithographie
Une fois la thèse en poche, un avenir plein d’opportunités s’offre à lui sous la forme de trois postdoctorats !
Le grand gap au Canada
En 2009, l’université de Sherbrooke au Canada, Québec le recrute pendant deux ans pour développer des transistors grand gap. Il redéveloppe alors complètement la chaîne de fabrication à destination de véhicules hybrides. Il utilise des épitaxies AlGaN/GaN sur substrat de SiC (Carbure de Silicium) pour ses meilleures performances en puissance et sa stabilité.
Parallèlement à sa mission principale, il continue de se former à de nouvelles expériences :
– il développe des LED UV et bleues à base de GaN qui servent au traitement de la peau
– il encadre des élèves en fin de cycle ingénieurs pour développer des bancs de caractérisation de transistors HEMT AlGaN/GaN, caractériser des gravures du même matériau et les LED.
Come-back IEMN
Pour son deuxième post-doc, il réintègre l’équipe PUISSANCE en 2011 et travaille sur un projet ANR Deltadiam en collaboration avec ESRF, CEA Saclay et l’institut NĖEL de Grenoble. Il reprend les procédés de sa thèse mais cette fois pour des transistors tout diamant et des motifs de caractérisation matériau (barres de Hall) en lithographie électronique (Fig.3) sur substrats diamant monocristallin de dimensions très petites (2x2mm² et 3x3mm²).
Son troisième post-doc de 2012 à 2015 qui lui offre l’opportunité de diversifier ses compétences dans l’équipe AIMAN-FILMS sur un projet ANR Livecams. Se tournant vers la mécanique des fluides et plus particulièrement le contrôle des écoulements, il conçoit et caractérise des actionneurs appelés jets synthétiques (Fig. 4) qui sont placés à l’arrière d’un véhicule en vue d’optimiser son aérodynamisme. En effet, le contrôle actif d’écoulement par des jets synthétiques, caractérisés par une phase de soufflage et une phase d’aspiration, a pour but de modifier les tourbillons qui se forment à l’arrière d’un véhicule pendant son déplacement et de réduire in fine la consommation de carburant. La fabrication de plus de 120 actionneurs avec packaging, sur des substrats de silicium 4 pouces, a été nécessaire pour ce projet.
Ce projet à visée industrielle coordonné par Philippe Pernod s’inscrit alors dans un partenariat public-privé avec le groupe PSA Peugeot Citroën.
Il associe plusieurs organismes :
– l’IEMN pour la conception, réalisation et caractérisation de réseaux de jets MMEMS (Magneto-MicroElectroMechanical Systems) (Fig. 5 gauche)
– le laboratoire PRISME (Laboratoire pluridisciplinaire de Recherche en Ingénierie des Systèmes, Mécanique, Énergétique) à Orléans pour la mise à disposition de la soufflerie et la fabrication de la maquette de véhicule (Fig. 5 droite)
– le laboratoire de Mathématiques Jean Alexandre Dieudonné (LJAD) à Nice pour la partie simulation numérique sur maquette.
Après un poste d’enseignement en tant qu’ATER pendant un an à Centrale Lille et après avoir formé un post-doctorant et une doctorante en salle blanche sur la réalisation de capteurs multiphysiques mesurant la température, la pression et la vitesse, il est recruté la SATT Nord (Société d’Accélération du Transfert de Technologie) en 2016 sur un CDI Chantier pour un poste d’ingénieur maturation où il participe au développement d’une pince acoustique à onde focalisée en utilisant les propriétés d’un matériau piézoélectrique (Fig. 6) dans le cadre du projet Acoustipince (voir p. 14 : https://www.satt.fr/wp-content/uploads/2018/01/rapport-dactivite-pdf-interactif-2016.pdf) au laboratoire de Biologie de niveau 2 de l’IEMN pour la manipulation sans contact de micro-objets (billes de polystyrène) et, à terme, de cellules vivantes, en collaboration avec des biologistes. Le système s’adapte sur des microscopes inversés.
Ce travail est réalisé sous la direction de Madame Ouafae Cohin, chef du projet côté SATT * Nord et Michaël Baudoin, porteur du projet côté IEMN.
Pour conclure, son plaisir de concevoir et de maîtriser toute une palette de procédés technologiques et de machines a permis à Jean-Claude de se façonner un parcours aux multiples facettes. C’est tout naturellement qu’il s’est tourné vers son projet de maturation actuel – un projet interdisciplinaire qui offre des perspectives de débouchés vers l’industrie ou la start-up. Pour mener à bien ce projet, Jean-Claude, comme tout bon chercheur et tout particulièrement pour ce projet, met en œuvre ses capacités de créativité, de réactivité et d’adaptabilité au quotidien. Pour respecter les délais impartis, il se doit d’être également autonome au cours de chaque phase de la chaîne de développement et d’être un bon communicant. On peut également ajouter une autre qualité appréciable qui nous a permis de réaliser ce portrait : son sens de la collaboration.
Et pour clore ce travail, voici une citation de Jean-Claude à la fois théorique et pratique, à méditer sans restriction pour les chercheurs mais aussi dans la vie de tous les jours :
« Pour chaque problème, il y a au moins une solution. Et, trouver un maximum de solutions permet de choisir la meilleure. »
* La SATT est issue du programme « investissements d’avenir » lancé par le gouvernement en 2010 sous forme d’appels à projets pour accroître l’innovation en France. Insérée dans un réseau national de 14 entités, la Société d’Accélération du Transfert de Technologie du Nord qui englobe depuis 2012 la partie haute du territoire (Hauts-de-France et Champagne Ardennes), accompagne les laboratoires dans la valorisation de leurs projets. Forte d’une équipe pluridisciplinaire (chefs de projets, chargés d’affaires et experts juridiques), elle emploie son savoir-faire à la maturation de projets, appliquée à toute la chaîne de R&D, appuyant son expertise à chaque phase de développement, depuis la détection des potentiels d’innovations et l’analyse de brevetabilité pour laquelle elle rédige des rapports de propriété intellectuelle jusqu’à la mise sur le marché de la technique ou du produit.
(c) Auteure : Karine Perrot – IEMN-ECM