Améliorer le confort thermique d’un textile en contrôlant ses propriétés optiques


Une des voies pour limiter la consommation énergétique de nos bâtiments passe par l’amélioration des propriétés thermiques des textiles que nous portons. Dans ce cadre nous avons montré qu’une structure multicouche asymétrique alliant une fine couche métallique prise en sandwich entre deux membranes polymères intégrant des particules de SiO2 ou d’épaisseurs différentes, peut assurer une température de peau à 34°C. Ainsi l’association de ces 3 éléments sur un support textile permet de contrôler  son émissivité dans la gamme de longueur d’ondes du moyen infra-rouge. En jouant sur la réversibilité de la structure asymétrique, le confort thermique est alors obtenu pour une large gamme de températures ambiantes (de 7°C à 16°C).

Représentation schématique du tissu asymétrique. (a) Représentation 3D de la structure avec des particules de SiO2 distribuées de manière aléatoire dans la membrane de polyéthylène (PE) supérieure. (b) Représentation 3D des deux modes de fonctionnement du tissu. Le mode extérieur est obtenu lorsque le PE avec les particules est orienté vers l’environnement, le mode intérieur lorsque la structure est retournée.

L’amélioration des performances de chauffage radiatif des textiles devient l’un des sujets de recherche les plus actuels afin de réduire la consommation d’énergie utilisée pour contrôler la température des espaces intérieurs.
À une température normale de 34 °C, la peau humaine émet des radiations infrarouges (IR) thermiques dans la plage 5-15µm (moyen infra-rouge, MIR) avec un pic maximal autour de 9,6 µm de longueur d’onde. Pour un individu au repos, le rayonnement infrarouge représente plus de 50 % des pertes totales de chaleur du corps. En contrôlant l’émissivité, la transmissivité et la réflectivité du rayonnement infrarouge du corps humain à travers les textiles, la température dans l’espace entre la peau et le textile (microclimat) peut être ainsi contrôlée.

Dans ce contexte, nous proposons une conception asymétrique pour une fonctionnalité de réchauffement dans des environnements intérieurs à moyenne et basse températures. La structure consiste en une fine couche métallique prise en sandwich entre deux membranes de polyéthylène (PE) de même épaisseur, où des particules de SiO2 sont introduites dans l’une des deux membranes. Ainsi, nous combinons l’effet d’absorption des particules diélectriques aux propriétés réfléchissantes du métal et proposons un design de gestion thermique très performant. En jouant ensuite sur la réversibilité de la structure asymétrique nous avons pu montrer un élargissement significatif la plage de température utile pour conserver le confort thermique.

Dans un premier temps nous présentons la géométrie du tissu et la méthode numérique utilisée pour les calculs électromagnétiques. Ces outils nous permettent de démontrer l’impact de l’insertion de particules sur l’émissivité du tissu dans la gamme MIR. Après fabrication et caractérisation, nous trouvons un bon accord entre les spectres IR à transformée de Fourier (IRTF) et les données numériques. Ces propriétés optiques nous servent ensuite à déterminer les performances thermiques de la structure obtenues par chauffage radiatif du tissu complexé à notre multicouche et en les comparant à un textile type coton. Pour ce dernier le confort thermique de 34°C sur la peau est obtenu pour une plage de de température comprise entre 20 et 24°C alors qu’elle s’étend de 8.6°C à 13.7°C pour notre structure multicouche complexé à textile classique. Ces résultats sont confirmés qualitativement par caméra thermique.

Nous avons également étudié la question de la respirabilité de la membrane, paramètre clef pour les textiles portés. Que ce soit en utilisant du PE nano poreux ou en créant des ouvertures de taille inférieure à la longueur d’ondes (dans notre cas 5 µm), les performances optiques de la structure ne sont pas modifiées.

Ce travail s’est effectué en collaboration avec les laboratoires UMET et GEMTEX de l’Université de Lille dans le cadre d’un contrat Interreg Photonitex (2018-2022). Il se poursuivra au travers le contrat ANR-PRCE POCOMA en collaboration avec l’industriel DAMARTEX (2022-2026).

https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1002/admt.202101738