1. Modélisation comportementale des systèmes opérant en fréquences millimétriques
Les ressources spectrales de plus en plus contraignantes en basse fréquence ont été très largement favorables à la montée en fréquence des systèmes de radiocommunications. La bande de fréquence avoisinant 60 GHz a été investiguée et les nombreux facteurs limitatifs aux performances de ces systèmes ont été modélisés.
Ces facteurs sont la propagation multi-trajets en environnement intra-bâtiment, le bruit de phase des oscillateurs locaux, les non-linéarités des amplificateurs de puissance, les interférences et les ressources spectrales. Les modèles comportementaux de ces différents facteurs limitations intervenant à la fois sur la couche physique et sur la couche MAC (Medium Access Control) ont permis d’élaborer des topologies originales de systèmes radiofréquences pour les communications et la géolocalisation par le périmètre système ainsi établi, présenté figure 2.
Les systèmes à impulsions ultra large bande transposées à 60 GHz
Une solution permettant de se prémunir de ces limitations et basée sur des impulsions ULB (Ultra Large Bande) transposées à 60 GHz a été développée à l’IEMN en technologie MMIC. Cette solution originale, et dont l’IEMN est le précurseur, propose une alternative aux systèmes ULB « sans porteuse » développés dans les bandes de fréquences comprises entre 3 à 10 GHz, bandes de fréquences allouées et fortement contraintes par des limitations de densité de puissance maximale rayonnée (-41,3 dBm/MHz). Le système à impulsions ULB transposées à 60 GHz présente l’avantage de ne pas être contraint pas ces limitations. Un autre avantage concerne les antennes de faibles dimensions à 60 GHz qui minimisent l’encombrement du système global. Une illustration de l’émetteur de ce système est présentée Figure 3.
D’abord conçues et réalisées en technologie III-V (filières pHEMT 0.2 μm et 0.1 μm), ces architectures ont ensuite, toujours à l’IEMN, évolué vers les filières BICMOS puis CMOS pour enfin être transférées vers le CEA-Leti et STMicroelectronics.
2. Systèmes Radio sur Fibre Optique
Cet axe de recherche vise à renforcer la connexité des réseaux dits hybrides car ils allient les domaines de l’optoélectronique et des radiofréquences. L’intérêt des solutions développées par CSAM est d’utiliser les fibres multimodes pour déporter optiquement des signaux radiofréquences répondant aux différents standards et normes de radiocommunications, mais également des signaux RF millimétriques.
a. Déport optique de signaux standards sur fibre optique multimode
La figure 4 illustre la topologie des systèmes radio sur fibre qui ont permis de réaliser les premières démonstrations de transmissions sur fibre multimodes.
Ces travaux ont abouti à la réalisation d’une plateforme de tests de signaux toujours plus complexes (WiMedia, 10Gigabit Ethernet, …) avec une approche multi-services par multiplexage en longueur d’onde qui a été démontrée pour la première fois. Cette plate-forme permet aujourd’hui de tester les dernières FOM des principaux fabricants (Corning, Asahi, Prysmian Communications,…) et joue un rôle important dans le laboratoire commun initié depuis 2010 entre l’IRCICA et Prysmian. Une illustration d’un banc de test de cette plate-forme est proposée Figure 5.

Figure 5 – Banc de test de transmission optique de signaux LTE et WiMedia sur fibres multimodes de verre à des longueurs d’onde de 850 nm.
b. Systèmes radio sur fibre pour communications millimétriques
La couche MAC ((Medium Access Control) a pour fonction d’orchestrer les échanges d’informations entre différents utilisateurs, objets communicants ou systèmes autonomes tels que des capteurs. Dans les réseaux probabilistes tels que les réseaux ad hoc, le protocole MAC gère les collisions éventuelles. Dans le cadre d’une coopération avec le laboratoire OPCOMNET spécialisé dans l’étude des fibres polymère, nous avons développé une solution mixte fibre-radio assurant les fonctionnalités du protocole MAC à la fois sur le segment RF à 60 GHz et sur le lien optique.
Pour optimiser l’encombrement et la complexité des transducteurs, un système à impulsions sub-nanosecondes a été développé par CSAM. Le système développé présente une architecture originale à la fois sur le segment RF et sur le déport optique sur fibres multimodes et ce, dans une configuration multi-sauts présentée Figure 6. Au contraire d’une transmission numérique en bande base, la transmission d’impulsions sur la fibre optique polymère permet d’effectuer un multiplexage temporel des communications dans un environnement multi-utilisateurs. Cette solution est une première en termes de convergence entre les domaines des communications optiques et radiofréquences à la fois au niveau de la couche physique mais également de la couche MAC.
3. Faible consommation énergétique
La faible consommation énergétique des composants, circuits et systèmes est un défi permanent dans le domaine des radiocommunications. La problématique est vaste car liée à un champ d’applications considérable. Sur la base de modèles comportementaux des différentes limitations, plusieurs topologies « clés » ont été identifiées. La figure 7 présente les différentes actions menées.
Ces travaux que nous avons menés dans le cadre des différentes thèses sur les systèmes de radiocommunications millimétriques à l’IEMN et à l’IRCICA, ont été précurseurs au niveau national et international. Les architectures des systèmes à impulsions ULB transposés à 60 GHz ont été à l’initiative de nombreux travaux à l’échelle internationale. D’autres laboratoires nationaux historiquement spécialisés dans la conception de circuits à partir de filière technologique Silicium ont ensuite développé une activité dans cette bande de fréquence, encouragés par l’intérêt croissant des industriels. Dans un contexte où la bande de fréquences autour de 60 GHz est désormais à maturité commerciale, mes travaux effectués sur la base des filières basse consommation présentent des résultats à l’état de l’art.
Une illustration d’une architecture développée à 140 GHz est proposée Figure 8.
Aujourd’hui, notre démarche scientifique aboutit à des solutions d’architectures à la fois performantes et originales et permet de renforcer des collaborations fructueuses à l’échelle nationale avec STMicroelectronics et le CEA-Leti, mais également à l’échelle internationale à travers plusieurs projets européens (SIAM, QStream, MIRANDELA).
Les caractéristiques importantes de ce système totalement intégré en technologie BiCMOS sont l’encombrement de 0,11 mm² et le rendement énergétique 5.7 pJ/bit à 14 Gbits/s, ce qui constitue une performance à l’état de l’art. Les perspectives sont donc prometteuses avec des débits encore plus importants, jusqu’à 30 Gbits/s. Egalement, le défi du rendement énergétique inférieur à 1 pJ/bit pourra être relevé comme le montre la courbe de tendance de la figure 8 et correspond à l’un des thèmes du laboratoire commun IEMN-STMicroelectronics.
4. Localisation Ubiquitaire
La notion de localisation ubiquitaire s’inscrit dans une logique de continuité de services en milieux intra-bâtiments et autres milieux confinés ou contraints où les solutions de type GPS sont pris à défaut. La problématique première de cette thématique, outre la précision de localisation, est la non-nécessité de déployer une infrastructure lourde. Dans le cadre de projets régionaux et nationaux, nous avons développés des systèmes et des algorithmes dédiés à la localisation d’objets mobiles communicants en bande millimétrique.
Les travaux menés par CSAM ont montré que la bande de fréquence autour de 60 GHz est appropriée à cette problématique : la bande spectrale importante constitue un paramètre clé pour la précision de la position estimée sans recours aucun aux algorithmes de super-résolution tels que MUSIC (Multiple Signal Classification) qui perdent leur intérêt lorsque les bandes de fonctionnement ne sont plus du domaine de la bande étroite (BW > 100 MHz).
Ceci permet de réduire la dilution géométrique de la précision (Figure 9-a) et d’atteindre des précisions centimétriques (Figure 9-b) avec des temps de calcul réduits, compatibles avec des applications temps réel.
Une autre particularité des démonstrateurs développés est d’utiliser une topologie radiofréquence identique à celle des systèmes de communications et minimise fortement le déploiement de nouvelles infrastructures. Au-delà de cette fréquence de fonctionnement, l’originalité des activités menées sur cette thématique réside dans l’approche à la fois matérielle et logicielle, par la modélisation et la réalisation d’architectures matérielles innovantes associée à l’élaboration de nouveaux algorithmes de localisation spécifiques à la localisation temps réel.
Les problématiques liées à la localisation ubiquitaire nécessitent de conjuguer les actions au niveau des filières technologiques, de l’architecture matérielle et du développement algorithmique. Il s’agit d’une thématique pluridisciplinaire qui s’appuie sur les ressources de l’IEMN et de l’IRCICA qui sont le siège de cette convergence de technologies.